question posée le 21-03-2019 par Paul
On m'a appris à l'école que le printemps tombe le 21 mars, donc j'ai du mal à comprendre que cette année ce soit le 20 mars. J'ai cru comprendre que c'est une affaire d'astronomie, d'où la question que je vous pose ici... Par avance merci de votre aide !
réponse du 21-03-2019 par Patrick Babayou
On ne vous a presque pas menti à l'école. Le concile de Nicée, en l'an 325 de notre ère, fixe au 21 mars la date de l'équinoxe. A cette époque-là, le calendrier julien était en vigueur, depuis la réforme instituée par Jules César soi-même. Le calendrier julien corrige par l'année dite « bissextile », revenant tous les 4 ans, l'écart entre l'année sidérale qui dure 365,25 jours et le calendrier, qui dure donc 365 jours 3 années sur 4, et 366 jours la quatrième année pour corriger cet écart.
Donc sous le régime de l'année bissextile nous obtenons logiquement une variabilité de la date des saisons, sur 3 voire 4 jours, et cela que le concile le veuille ou non. On tient compte bien sûr de l'heure, ce qui fait qu'un équinoxe qui se produit à 23h50 le 20 mars n'est pas le même jour qu'un équinoxe à 0h15 le 21 mars.
Ainsi, l'équinoxe de printemps tombe le 20 ou le 21 mars. Sauf en 2044 où il se produira le 19 mars.
De même pour les autres saisons, par exemple la date de l'été tombe en général le 21 juin mais c'était le 20 juin en 2008 et le 22 juin en 1975.
Or ce calendrier julien dérivait par rapport au soleil, c'est-à-dire que l'équinoxe de printemps se produisait vers le 11 mars dans les années 1580. Outre la durée de l'année sidérale - le temps que met le soleil à passer au même méridien dans le ciel - qui s'élève donc à 365,2566 jours, il fallait aussi tenir compte de l'année tropique, qui est le temps entre deux passages du soleil au même point de l'écliptique (appelé le point vernal pour l'équinoxe de printemps). Or cette année tropique, qui correspond au réel écart entre deux équinoxes de printemps, dure 365,2423 jours.
Un tout petit écart avec l'année sidérale, qui est lié au phénomène de précession des équinoxes, qui est à l'origine de la dérive du calendrier julien par rapport au rythme des saisons mesuré par l'année tropique.
C'est-à-dire que le printemps (et les autres saisons) arrivaient environ 3 jours plus tôt au bout de 400 ans. D'où la réforme dite « grégorienne » qui a remis le calendrier à l'heure de l'année tropique, d'une part en supprimant dix jours du calendrier en 1582 (le lendemain du 5 octobre fut le 15 octobre, ce qui correspondait grosso modo à l'écart accumulé pendant les 1.257 années écoulées depuis le concile de Nicée), d'autre part en modifiant le rythme des années bissextiles : les années des millésimes ne sont plus bissextiles, à l'exception de celles divisibles par 400. C'est-à-dire que 1700, 1800 et 1900 n'étaient pas bissextiles, alors que 1600 et 2000 l'ont été. Ce qui revient à neutraliser le décalage de 3 jours.
Mais la correction de ce petit écart contribue, elle aussi, à faire varier la date du printemps (et des autres saisons).
Pour revenir à votre question, tout calendrier n'est qu'affaire de convention tout en cherchant à se régler au mieux sur un phénomène astronomique : la durée des jours et des nuits, et son corollaire climatique : l'alternance des saisons. Fixer le 21 mars était une convention mais l'astronomie étant têtue, ça ne pouvait pas rester le 21 mars indéfiniment.
Et comme rien n'est simple dans la mécanique céleste, avec beaucoup de décimales et des cycles qui se combinent les uns aux autres (année tropique, année sidérale, précession des équinoxes...), il était difficile de trouver un calendrier où les saisons tomberaient à des dates fixes, en entendant par là non seulement un repère invariant dans le calendrier (le 21 mars qu'on vous a appris à l'école) mais aussi un nombre fixe de jours calendaires entre deux débuts de saison (365,2423 jours de l'année tropique, ce n'est pas facile à faire rentrer dans les cases d'un calendrier).