Eclipse Lunaire

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
13 MAI 2003

Harrison Schmitt, un des derniers Hommes à avoir marché sur la Lune, lors de l\'ultime mission lunaire habitée, Apollo 17, en 1972. Combien de temps s\'écoulera avant que nous puissions revoir en direct de telles images ?
Harrison Schmitt, un des derniers Hommes à avoir marché sur la Lune, lors de l'ultime mission lunaire habitée, Apollo 17, en 1972. Combien de temps s'écoulera avant que nous puissions revoir en direct de telles images ?

Nasa, équipage Apollo 17

Un jour ou l’autre, d’ici à une centaine d’années peut-être, des êtres humains auront la chance de pouvoir observer des éclipses de Soleil environ deux fois par an, sans même être obligés de bouger de chez eux pour cela. Seul petit détail, ils ne vivront pas sur Terre, mais sur la Lune, et les éclipses de Lune des Terriens coïncideront avec les éclipses de Soleil des Lunaires…Voici un petit récit d’anticipation qui va tenter de vous faire partager leurs émotions d’alors.

C’était le 28 mai 2105. La porte du sas glissa sur le côté et Jack fit quelques pas sur le sol lunaire. La surface poussiéreuse brillait, réfléchissant la lumière du Soleil. Plissant les paupières, Jack se mit à inspecter l’horizon incurvé. Soudain il l’aperçut, un cercle parfaitement rond dans le lointain. « Parfait » pensa-t-il en enchaînant les bonds dans sa direction.

« Bon, Jack… » crachota la radio au bout d’un moment. « Il faudrait peut-être commencer à se préparer. L’éclipse commence dans 5 minutes ».

« Papa… Je sais quand même ce que je fais » répondit Jack sur un ton aussi courroucé que le lui permettait sa voix d’adolescent. Et joignant le geste à la parole, il fit un dernier bond, puis s’arrêta net. Jack ne voulait rien manquer du spectacle.

En grommelant, il se mit à chercher quelque chose dans son dos (ce qui n’a rien d’évident lorsqu’on est engoncé dans une combinaison spatiale) et tira sur des bandes velcro. Encore quelques tâtonnements et il finit par mettre la main dessus : la chaise de camping de son arrière-grand-père. Elle avait près de 100 ans d’existence, et était constituée d’une toile verte tendue entre des tubes d’aluminium. Cette relique avait une grande valeur sentimentale pour la famille de Jack.

Jack déplia la chaise dans la poussière lunaire, en fit le tour et se glissa dans l’étroit passage délimité par les deux accoudoirs. D’une simple pression sur un de ses gants, il appliqua une tension électrique au matériau de sa visière, ce qui eut pour effet de la rendre aussi opaque que des lunettes de soudeur à l’arc. « Ces matériaux de pointe sont vraiment géniaux » se réjouit-il. Il pouvait à présent regarder directement le Soleil sans danger pour ses yeux.

Il passa l’heure suivante à observer le disque solaire glisser derrière quelque chose de sombre et grand : la Terre. Vue depuis la Lune, la Terre semblait trois fois et demie plus grande que le Soleil. Certains jours sa surface bleue et couverte de nuages paraissait extraordinairement brillante. Cependant aujourd’hui, c’était le côté sombre de la Terre qui faisait face à la Lune. Puis enfin le Soleil disparut. C’était ce qu’il attendait depuis le début. Eclairés à contre-jour, les bords de l’atmosphère terrestre se parèrent d’une lueur crépusculaire, enserrant d’un anneau rougeâtre la sombre planète. Au-delà s’étendait la couronne solaire, d’un blanc pale, hérissée comme la chevelure de la sœur de Jack quand elle frotte ses chaussettes contre le tapis de leur maison lunaire.

Jack éclaircit alors sa visière pour profiter du spectacle.

Le sol autour de lui ne brillait plus du tout. Il était recouvert d’une faible lueur d’un rouge sombre, celle-là même que renvoyait les bords de l’atmosphère terrestre. C’était comme si tous les couchers de Soleil du monde envoyaient leurs derniers feux vers Jack ce jour-là.

« Je suis sûr qu’il aurait adoré ça » se dit alors Jack en pensant à son arrière-grand-père, Don Pettit, responsable scientifique de la Station Spatiale Internationale d’alors. Ce que Don appréciait par-dessus tout en orbite, c’était de voir le Soleil se coucher et embraser l’atmosphère terrestre.

Une fois sa mission accomplie et de retour sur Terre, il n’avait jamais raté une occasion de prendre place autour d’un bon feu de camp, dans sa chaise de camping, et de raconter à ses enfants le détail de ses aventures spatiales.

La radio crachota à nouveau : « Jack, tu vois ce que je vois ? »

« Oh que oui, je le vois… Merci Papa » répondit Jack, d’une voix qui n’avait plus rien de contrarié…

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