Ces virus de l'herpès qui se réveillent lors d'un séjour dans l'espace

article de Patrick Babayou
31 MARS 2019

Ceci n'est pas le prochain scénario d'un blockbuster hollywoodien ni une nouvelle apocryphe de Ray Bradbury. Une étude très sérieuse de la NASA, publiée dans la revue « Frontiers in Microbiology », montre que la moitié des astronautes qui ont séjourné dans la station spatiale voient le virus de l'herpès se réactiver. Et cette proportion de réactivation du virus augmente avec la durée du séjour dans l'espace.

Dès lors qu'une personne a été affectée par un virus de l'herpès - il en existe huit principaux types - le virus reste à vie dans son corps, dans un état inactif. Certaines circonstances telles que le stress ou une baisse ponctuelle des défenses immunitaires peuvent provoquer un réactivation du virus et l'apparition de symptômes. Le taux d'infection par un virus de l'herpès s'élève entre 70% et 95% selon les populations humaines.

L'étude a porté sur une très longue durée, étudiant les fluides corporels des astronautes des missions de la navette spatiale (qui duraient moins de 15 jours) et des séjours dans la Station Spatiale Internationale (qui peuvent atteindre 6 mois).

53% des astronautes des missions des navettes spatiales ont vu la présence de virus de l'herpès dans leurs échantillons de salive ou urine, et ce taux monte jusqu'à 61% pour ceux de missions de l'ISS. Cette élimination des virus se poursuit jusqu'à 30 jours après un séjour dans l'ISS.

Les facteurs de stress jouent probablement aussi un rôle significatif. Les astronautes sont soumis à des variations fortes de gravitation, notamment les accélérations et décélérations du voyage, ils reçoivent aussi des rayons cosmiques et vivent en microgravité. S'ajoutent aussi d'autres stress liés à l'isolement ou encore la perturbation du cycle de sommeil.

Ces résultats corroborent des études antérieures qui ont montré que le système immunitaire des astronautes subit des dérèglements lors des séjours spatiaux.

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Plus généralement, le cas du réveil du virus de l'herpès peut se rapprocher de la certitude que l'on a acquise sur des modifications de la manière dont se comportent les cellules vivantes dans l'espace.

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Il faut aussi noter que cette étude a donné lieu à une retombée directe dans les soins terrestres puisque les tests rapides développés pour la détection des virus de l'herpès chez les astronautes commencent à être utilisés dans des hôpitaux.

Ces recherches font étrangement écho avec la nouvelle de Ray Bradbury, « Et la Lune qui luit », épisode des « Chroniques martiennes » qui voit les derniers autochtones de la planète rouge décimés par la varicelle, importée par un des équipages humains. Si l'on est sûr aujourd'hui qu'il n'existe pas de Martiens à contaminer, les éventuelles futures expéditions humaines ne manqueront pas d'exporter nos misères, dont nos virus compagnons.

Les futurs séjours de très longue durée nécessiteront donc des mesures adaptées, les défaillances du système immunitaire dans l'espace étant une difficulté supplémentaire, que ce soit le rêve d'aller jusque sur Mars, mais aussi le commandement fixé cette semaine par l'administration américaine d'établie une présence permanente sur la Lune.

Aller plus loin : Herpes Virus Reactivation in Astronauts During Spaceflight and Its Application on Earth, Frontiers in Microbiology