Vous cherchez des planètes ? Traquez la poussière !

article de Didier Jamet
19 FEVRIER 2002

Le disque circumstellaire qui enserre notre propre système solaire se révèle sur cette image du satellite COBE, prenant la forme d’une élégante arabesque bleutée. Alors que COBE devait uniquement enregistrer les fluctuations du fond cosmologique à 3 degrés Kelvin, il a également surpris le rayonnement infrarouge très faible du dique local de poussières, rayonnant lui aussi à très basse température. Les anglo-saxons ont un joli nom pour caractériser ce genre de découvertes au petit bonheur : la Sérendipité. Bien que ce mot soit d’origine latine, il ne figure pas au dictionnaire, et nous revient défiguré d’outre-Atlantique. Mais que fait l’Académie ?
Le disque circumstellaire qui enserre notre propre système solaire se révèle sur cette image du satellite COBE, prenant la forme d’une élégante arabesque bleutée. Alors que COBE devait uniquement enregistrer les fluctuations du fond cosmologique à 3 degrés Kelvin, il a également surpris le rayonnement infrarouge très faible du dique local de poussières, rayonnant lui aussi à très basse température. Les anglo-saxons ont un joli nom pour caractériser ce genre de découvertes au petit bonheur : la Sérendipité. Bien que ce mot soit d’origine latine, il ne figure pas au dictionnaire, et nous revient défiguré d’outre-Atlantique. Mais que fait l’Académie ?

Michael Hauser – STSci – COBE/DIRBE science team- Nasa

C’est l’étonnant mot d’ordre que pourraient se voir intimé les prochaines missions spatiales, bientôt lancées en éclaireur à la recherche de planètes extrasolaires. Une équipe Européenne vient en effet d’obtenir la preuve indirecte de l’existence d’un disque de poussières autour de notre propre système solaire. Ce disque de poussières diffus n’aurait pu survivre jusqu’à aujourd’hui sans la présence en son sein des innombrables planétoïdes qui constituent les marches de l’empire Solaire. Cette conclusion peut être raisonnablement généralisée à l’ensemble des systèmes planétaires.

Cette découverte est le fruit d’une passionnante traque qui prend sa source dans les années 70, époque bénie de la conquête spatiale : Après avoir dépassé l’orbite de Saturne, au bout de longues années de navigation, les sondes spatiales Américaines Pioneer 10 et 11 se mettent à rencontrer sur leur chemin des particules de poussières d’origine inconnue. Ces poussières intriguent les scientifiques : d’où peuvent-elles bien venir ?

Dégazage cométaire ?

L’éventualité selon laquelle ces poussières proviendraient de noyaux cométaires est vite écartée : Si à proximité du Soleil les comètes vaporisent en effet d’intenses quantités de poussière, le froid qui règne au-delà de saturne les maintient à l’état de boules de neige sale parfaitement inertes.

Le mystère reste entier pendant de longues années. Ces poussières ont-elles une source inconnue cachée au sein du système solaire, ou bien proviennent-elles en droite ligne du très mal connu milieu interstellaire ?

Heureux qui comme Ulysse a survolé les pôles du Soleil

Vint alors la mission Ulysse. Entre 1994 et 1995, tandis qu’elle survolait les pôles du Soleil, la sonde a recueilli des poussières d’origine indiscutablement cosmiques, puisque prélevées très au-dessus de l’écliptique, le plan du système solaire. Et ces poussières se sont avérées beaucoup plus petites que celles croisées par les Pioneer, 10 à 100 fois moins, signe évident de leur absence de parenté. Dans l’esprit des chercheurs, l’origine locale des gros grains ne faisait plus aucun doute.

Alors, à force de calculs et de simulations sur ordinateurs, les scientifiques sont parvenus à la conclusion que la seule explication possible à la présence de ces grains de poussière était les fréquentes collisions entre les innombrables petits objets glacés de la ceinture de Kuiper.

Où l’on arrive aux planètes, mais par la bande

L’intérêt de ces objets de Kuiper, c’est qu’ils sont en fait les résidus de la formation du système solaire. Au-delà de l’orbite de Neptune, loin de l’étoile centrale, la densité initiale en gaz et matériaux divers nécessaires à la formation de planètes était extrêmement faible dans la nébuleuse protosolaire primitive. Seuls de petits corps ont donc eu le temps de s’agréger, avant que tout le gaz ne se soit dissipé sous l’effet du rayonnement ultraviolet du jeune Soleil. Très nombreux, concentrés au-delà de l’orbite de Neptune, les objets de la ceinture de Kuiper entrent sans cesse en collision les uns avec les autres, engendrant les poussières détectées par les Pioneer, au rythme estimé de 50 tonnes par jour.

Aujourd’hui, l’équipe scientifique emmenée par Markus Landgraf, à partir des données de fournies par les Pioneer sur les densités de poussières rencontrées, a calculé que ce disque, bien que diffus, serait néanmoins décelable dans l’infrarouge à grande distance. Ils en ont donc déduit que d’autres systèmes planétaires évolués étaient parfaitement identifiables grâce à ce type de recherches.

" Si vous observez un disque de poussières autour d’une étoile de la séquence principale, c’est-à-dire une étoile en pleine force de l’âge, comme notre Soleil, vous pouvez parier que vous y trouverez également des planètes dès que vous aurez les instruments capables de les voir " Insiste Markus Landgraf.

Cette conclusion vient valider les efforts déjà entrepris dans ce sens, et qui ont par exemple entraîné la détection de disques circumstellaires autour de Véga de la Lyre ou d’Epsilon Eridani.

Cette étape est absolument incontournable avant la mise en chantier des projets titanesques tels que Darwin ou TPF, flottilles de télescopes spatiaux censées pouvoir nous offrir dans les 20 prochaines années une image de planètes semblables à la Terre. Mais les défis technologiques à relever et les coûts prévisionnels sont énormes. Aussi, la décision de lancer de telles missions ne pourra être justifiée sans indices sérieux qu’il y a bien quelque chose d’aussi extraordinaire que la Terre à découvrir autour d’un lointain Soleil. Les disques circumstellaires en regorgent peut-être

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