article de Fabrice Mottez
2 SEPTEMBRE 2002
La Terre est entourée d'une région invisible, très vaste, très peu dense dont le comportement est étroitement lié à celui du champ magnétique (principalement celui de la Terre) et au vent solaire (un vent de plasma très rapide soufflé en permanence par le Soleil). Cette vaste région, globalement moins dense que le milieu interplanétaire est la magnétosphère de la Terre. La magnétosphère nous a été révélée par l'exploration spatiale, il y a une quarantaine d'années. Elle n'a pas encore livré tous ses secrets.
C'est une zone dont seuls quelques pionniers soupçonnaient l'existence
dans les années 1930.
Depuis l'avènement de l'ère spatiale, force a été de constater son existence,
car c'est une
région qui englobe la plupart des orbites des satellites tournant
autour de la Terre.
On a découvert depuis le lien très fort qui relie la magnétosphère
et le phénomène connu et
spectaculaire des aurores polaires. C'est dans la magnétosphère et
son interaction avec le vent
solaire qu'il faut chercher l'origine des aurores polaires.
La compréhension de la physique de la magnétosphère est utile pour
comprendre les aurores,
mais aussi pour mieux appréhender le milieu dans lequel évoluent les
sondes spatiales
(l'activité du plasma ambiant est capable de les endommager).
Le plasma de la
magnétosphère est un plasma très peu dense, mais très actif.
Les phénomènes qu'on a pu
comprendre pour l'environnement de la Terre peuvent trouver d'autres
applications en
astrophysique car on retrouve de tels plasmas dans d'autres régions de l'univers.
On sait déjà
que d'autres planètes du système solaire ont une magnétosphère
(Mercure, Jupiter, Saturne,
Uranus, Neptune). La physique des plasmas dilués est également
essentielle pour comprendre
la couronne du Soleil. Les scientifiques français qui étudient les
magnétosphères et la
couronne solaire se sont même assemblés dans un programme de recherches
(le Programme
National Soleil Terre patronné par l'Institut National des Sciences de l'Univers).
Il est
probable que des planètes extra-solaires ont une magnétosphère
(nous reviendrons sur cette
question dans un prochain article). Beaucoup d'étoiles doivent également
avoir une couronne
semblable à celle du Soleil.
Depuis la fin des année 1960, on se fait une idée assez précise de la
structure globale de la
magnétosphère. Elle comprend plusieurs grandes régions délimitées par
des frontières parfois
très fines.
Le milieu interplanétaire est baigné par le vent solaire.
Celui-ci a une vitesse
supersonique. En amont de la Terre, il rencontre une onde de choc,
semblable à celle qui se
développe au devant des avions supersoniques. Derrière le choc se
trouve une région
tumultueuse appelée la magnétogaine.
Puis vient la frontière de la
magnétosphère, la
magnétopause, à l'intérieur de laquelle le champ magnétique est
d'origine terrestre, et le
plasma moins dense. En général, la magnétopause est étanche :
elle empêche le vent solaire de
rentrer (on parle d'une frontière tangentielle car la vitesse du plasma
est tangente à la
frontière). Une partie du vent solaire parvient néanmoins à pénétrer
dans la magnétosphère.
Une partie rentre en passant par les cornets polaires, deux régions
singulières ou la
magnétopause perd son « étanchéité ».
Une fois dans la magnétosphère, il faut à nouveau distinguer plusieurs régions.
La
magnétosphère du coté jour (vers le Soleil) est très différente de celle du
coté nuit. Du coté
nuit, la magnétosphère est étirée en longueur sur des centaines de milliers
de kilomètres (au
delà de la distance de la Terre à la Lune). La queue est le siège de phénomènes
dynamiques
appelés sous-orages, dont on sait depuis la fin des années 1960 qu'ils sont
à l'origine des
aurores polaires.
Les frontières de ces régions ne sont pas très rigides, elles se déplacent,
se déforment, parfois
en quelques jours, parfois en quelques minutes.
Si on connaît assez bien la morphologie de la magnétosphère,
la façon dont elle évolue, ses
changements brutaux de configuration et l'évolution de ses
frontières sont encore mal
compris. Un des problèmes vient de leur caractère invisible :
ces régions ne rayonnent pas (à
de rares exceptions près). Il n'est donc possible de savoir leur
existence que lorsqu'on est
dedans.