Un minimum solaire vraiment très bas

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
2 OCTOBRE 2008

Le Soleil vu le 27 septembre 2008 par le satellite SOHO. Pas une tache à l\'horizon, ni ailleurs...
Le Soleil vu le 27 septembre 2008 par le satellite SOHO. Pas une tache à l'horizon, ni ailleurs...

SOHO/NASA/ESA

Les astronomes qui étudient et comptabilisent les taches solaires viennent d’annoncer que 2008 était d'ores et déjà l'année la plus pauvre en taches solaires depuis 50 ans. Exprimé autrement, le Soleil n’a jamais produit aussi peu de taches depuis le vol du premier satellite en 1957. Une occasion unique pour les successeurs de Spoutnik d’en apprendre un peu plus sur notre étoile.

Au 27 septembre, 271e jour de l’année 2008, le Soleil s’est montré vierge de toute tache pendant déjà 200 jours. Pour retrouver pareil soleil immaculé, il faut remonter à 1954, soit trois ans avant le vol de Spoutnik, année où le Soleil fut sans taches pendant 241 jours.

« Le nombre de taches est à son plus bas de ces 50 dernières années » confirme David Hathaway, spécialiste en physique solaire de la Nasa. « C'est un minimum extrême du cycle solaire ». Ci contre dans la colonne de droite, on voit à quoi ressemble un Soleil sans tache. L'image, prise par SOHO le 27 septembre 2008, montre un soleil immaculé. En comparaison, une image Soho prise 7 ans auparavant, le 27 septembre 2001, est parsemée de taches colossales, elles-mêmes crépitant d'éruptions. La différence s'explique par le fait que nous ne trouvons pas du tout dans la même phase du cycle solaire. 2001 était une année de maximum, avec beaucoup de taches, d'éruptions et d'orages. 2008 est au point diamétralement opposé du cycle, au minimum, période traditionnelle de calme sur le Soleil.

Et ce minimum là est tout particulièrement minimaliste... Si l'activité solaire reste aussi basse, 2008 pourrait se monter à 290 jours sans tache à la fin décembre, ce qui pour le coup porterait le record à celui du siècle.

Hathaway attire notre attention sur le fait que cet évènement n’est en soi pas si extraordinaire qu'il n'y paraît au premier abord : "Si le minimum solaire de 2008 s'annonce bien comme le plus bas de ces 50 dernières années, il reste relativement banal par rapport aux minimaux de la fin du 19e siècle et du début du 20e." Ces derniers flirtaient allègrement avec les 200 ou 300 jours sans taches par an.

Certains physiciens solaires accueillent avec joie ce minimum extrême. "Cela nous offre l'opportunité d'étudier le Soleil sans l'embarras des taches" se réjouit Dean Pesnell, du centre spatial Goddard. "Nous disposons aujourd'hui de la meilleure instrumentation de tous les temps pour étudier le Soleil. Il y a une véritable armada de satellites d'observation du Soleil en orbite : soho, Hinode, ACE, stereo et d'autres. Si bien que nous allons forcément apprendre de nouvelles choses durant ce minimum de longue durée. »

Il cite l'exemple de l'héliosismologie : "en mesurant les vibrations à la surface du Soleil, les héliosismologues peuvent sonder l'intérieur de l'étoile de la même façon que sur Terre, les sismologues utilisent les tremblements de Terre et la propagation des ondes sismiques pour sonder l'intérieur de la Terre. Sans les taches, nous obtenons une vue bien meilleure de l'intérieur du Soleil et de sa dynamo interne."

Il y a aussi la question de la quantité d’énergie qui nous vient du Soleil" ajoute Pesnell "Les chercheurs observent en ce moment le Soleil le moins rayonnant qu'ils aient pu étudier. La différence est faible, une fraction de pourcent, mais cependant significative. Les questions de l'effet sur le climat seront légitimes si le Soleil reste sur ce régime."

Pesnell est le chef de projet pour l'Observatoire de la Dynamique Solaire, dont l’acronyme anglophone forme SDO, une nouvelle sonde équipée de tout ce qu'il faut pour étudier à la fois la quantité d’énergie rayonnée par le Soleil et les vibrations de sa surface. La fabrication de SDO est achevée, et il a passé les tests d'endurance de vibration et de choc thermique. "Nous sommes prêts à décoller ! Le minimum solaire est un excellent moment pour y aller !" insiste Pesnell.

Concomitamment avec ce minimum de taches, la sonde spatiale Ulysse a révélé une faiblesse du vent solaire. La pression du vent solaire a commencé à baisser plusieurs années avant le minimum actuel, aussi on ne sait pas comment les deux phénomènes sont exactement reliés, ni même s’ils le sont vraiment. Encore un mystère à éclaircir pour SDO et ses ainés dans la carrière.

Dans notre dictionnaire de l'astronomie...

"La nuit étoilée à Saint-Remy", de Van Gogh.<br>Pour voir l'Univers tel qu'il est, il faut soit la rigueur du scientifique, soit la sensibilité de l'artiste.Tout le reste n'est qu'illusion...
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