Stardust : L’Univers dans un grain de poussière… d’étoile !

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Patrick L. Barry
traduction de Didier Jamet
2 JANVIER 2004

Vue d’artiste représentant l’approche de la comète Wild 2 par Stardust
Vue d’artiste représentant l’approche de la comète Wild 2 par Stardust

JPL

Longtemps les philosophes ont cherché à « voir le monde dans un grain de sable », comme l’avait appelé de ses vœux le poète William Blake. A présent les scientifiques essaient de voir le Système Solaire dans un grain de poussière, cométaire en l’occurrence.

Si elle est couronnée de succès, la mission de la sonde Stardust s’achèvera avec le retour sur Terre d’échantillons de poussière cométaire, une grande première mondiale. Ce sera également la première fois qu’un matériau arrivera délibérément sur Terre en provenance de l’espace lointain.

Et ce ne sera pas une simple figure de style poétique que de dire que ces minuscules grains de poussière cométaire vont nous permettre de comprendre l’origine du monde et peut-être de la vie elle-même.

Les comètes sont en quelque sorte des congélateurs contemporains de la formation de notre système solaire. Croisant dans les confins glacés du système solaire depuis des milliards d’années, ces « boules de neige sale » grandes comme des astéroïdes ont subi très peu de modifications depuis leur formation, si on les compare aux planètes. Etudier le système solaire à travers les comètes, cela revient un peu à essayer de comprendre comment un gâteau de mariage a été préparé en examinant la pâte qui reste dans le mélangeur.

De fait, un certain nombre d’indices suggèrent que les comètes ont joué un rôle essentiel dans l’émergence de la vie sur notre planète. Le bombardement massif de comètes qu’a subi la jeune Terre pendant des millions d’années lui a probablement apporté une bonne part de l’eau qui lui vaut d’être aujourd’hui appelée la planète bleue. Et les comètes contiennent de complexes composés carbonés qui auraient pu jouer le rôle de briques élémentaires du vivant.

Lancée en 1999, Stardust va croiser ce 2 janvier 2004 la comète Wild 2, du nom de son découvreur Suisse. Avoir rendez-vous avec une comète n’a rien de romantique pour une sonde spatiale. Concrètement, ça ressemble à avoir rendez-vous avec une mitrailleuse lourde par une nuit brumeuse. Lorsque Stardust va plonger au travers de la queue de la comète, les grains de poussière qui s’échapperont de cette dernière percuteront la sonde à une vitesse relative de plus de 20 000 km/h, soit 6 fois plus vite que la plus rapide des balles.

Les « yeux » de Stardust, constitués d’une caméra embarquée, seront heureusement protégés de cette mitraille folle par un ingénieux système de périscope. Pour le reste des parties sensibles de Stardust, ce seront des « boucliers de Whipple » (du nom du théoricien qui le premier a proposé le modèle des boules de neige sale pour les comètes) qui s’interposeront, constitués de 5 rangées successives de plaques de fibres de carbone et de céramiques espacées les unes des autres de 5 centimètres.

Pour piéger les particules de poussières, Stardust va utiliser un matériau nommé Aerogel. L’Aerogel est une sorte de mousse solide si ténue qu’on perçoit à peine sa présence : 99 % de son volume est constitué d’air. Sa légèreté éthérée permet de capturer les grains de poussière sans les endommager. Les scientifiques responsables du projet espèrent en récolter plus d’un millier d’une taille dépassant les 15 microns.

Jusqu’en 1974, Wild 2 ne s’était jamais approchée du Soleil en deçà de l’orbite de Jupiter, époque à laquelle l’attraction de la planète géante perturba la trajectoire de l’astre chevelu au point de la faire chuter vers notre étoile, ce qui l’a rendue accessible sans trop de difficultés à une sonde partie depuis la Terre. Depuis lors, Wild 2 n’est pas passée plus de 5 fois dans le voisinage du Soleil, aussi ses constituants n’ont-ils été que très peu altérés par la chaleur de notre étoile. La poussière que Stardust va collecter sera donc un indice de première main sur les conditions qui ont présidé à la formation du Système Solaire, avant que le Soleil ne commence à cuire la pâte originelle il y a 4,5 milliards d’années.

Après la rencontre avec Wild 2, Stardust se lancera dans une nouvelle orbite autour du Soleil qui durera deux ans, avant le retour de sa capsule d’échantillon en janvier 2006. Celle-ci ressemble à une capsule Apollo en miniature, et comme sa grande sœur elle redescendra sur Terre au bout d’un système de parachutes et, si tout se passe comme prévu, atterrira dans l’Utah où l’attendra une équipe de récupération.

Voir le monde dans un grain de sable

Et le paradis dans une simple fleur

Tenir l’infini dans la paume de la main

Et l’éternité dans une heure.

William Blake, Augures d’innocence, 1800

Retrouvez la mission Stardust sur le site du JPL

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