Tempête Martienne en vue !

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
10 JUILLET 2003

Une boule de billard orange. Voilà l’aspect que revêt Mars lorsqu’elle est la proie d’une tempête de poussières d’échelle planétaire, ne laissant apercevoir aucune de ses structures de terrain familières.
Une boule de billard orange. Voilà l’aspect que revêt Mars lorsqu’elle est la proie d’une tempête de poussières d’échelle planétaire, ne laissant apercevoir aucune de ses structures de terrain familières.

NASA, Bell , Wolff , Hubble Heritage Team

Il se passe quelque chose en ce moment sur Mars, et c’est si grand que vous pouvez l’apercevoir à l’oculaire d’un télescope de 150 mm de diamètre !

Le premier juillet, un brillant nuage de poussières a fait son apparition au-dessus du bassin Hellas, gigantesque cratère d’impact situé sur l’hémisphère sud de Mars. Le nuage s’est vite étendu, si bien que le 4 juillet, il mesurait près de 1800 kilomètres de long, soit le quart du diamètre de Mars.

« On peut à présent apercevoir le nuage dans un télescope de 150 mm de diamètre » confirme Donald Parker, directeur éxécutif de l’ALPO, l’association des observateurs lunaires et planétaires. « en plein centre il est vraiment brillant » poursuit-il.

Parker suit à la trace le nuage depuis le début dans son propre télescope de 400 mm de diamètre. « Un filtre rouge peut aider » fait-il remarquer. « mais un simple morceau de gélatine rouge ou orange tenu entre l’œil et l’oculaire améliorera la visibilité du nuage ».

Il y a deux ans de cela, un nuage s’est développé à partir de ce même bassin Hellas pour finir par encercler complètement la planète rouge. Toutes les structures martiennes familières aux observateurs, les terrains volcaniques sombres de Syrtis Major par exemple, demeurèrent cachés pendant des mois. « Mars ressemblait à une boule de billard orange » se souvient Parker.

Faut-il s’attendre au même scénario ?

« Personne ne sait » confesse l’astronome James Bell de l’Université Cornell, qui a étudié la tempête de poussière de 2001 à l’aide du télescope spatial Hubble. « Nous ne comprenons toujours pas le mécanisme qui amène des nuages locaux à s’assembler pour finir par former de gigantesques tempêtes de poussières. »

Mars Global Surveyor et Mars Odyssey, deux sondes de la Nasa actuellement en orbite autour de Mars, ont observé beaucoup de « tempêtes régionales » similaires à l’actuel nuage du bassin Hellas. Elles persistent pendant quelques jours voire semaines, puis finissent par se dissiper. Elles prennent rarement une échelle planétaire. « Seules 10 tempêtes de poussières affectant l’ensemble de la planète ont été répertoriées depuis 1877 » confirme Parker.

Toutes les tempêtes de poussière martiennes, quelle que soit leur taille, sont alimentées par la lumière du Soleil. Celle-ci réchauffe l’atmosphère martienne et provoque un déplacement des masses d’air, qui à leur tour entraînent les poussières.

Du fait de l’extrême légèreté de l’atmosphère martienne, à peine 1 % de la densité de l’atmosphère terrestre au niveau de la mer, seuls les plus petits grains de poussière tiennent en l’air. Selon Bell, « les poussières en suspension dans l’atmosphère martienne ne sont guère plus grosses que celles constituant la fumée d’une cigarette ». Ces grains minuscules réfléchissent 20 à 25 % de la lumière solaire qui les atteint, donnant sa brillance au nuage qu’ils composent. (la réflectivité moyenne du sol martien est comprise entre 10 et 15 %).

L’ensoleillement sur Mars est sur le point de devenir particulièrement intense. La planète rouge court autour du Soleil selon une orbite elliptique dont l’excentricité est de 9 %, avec un point de cette orbite, le périhélie, 40 millions de km plus proche du Soleil que son extrémité opposée, l’aphélie. Mars atteindra le périhélie, soit sa distance minimale au Soleil, le 30 août prochain. Dans les semaines entourant le périhélie, l’ensoleillement dont bénéficiera Mars sera 20 % plus intense que ce qu’il n’est en moyenne dans une année martienne.

« Cela veut simplement dire que la saison des tempêtes débute à peine » résume Bell.

Pas moins de 4 sondes spatiales se dirigent vers Mars à l’heure actuelle, deux de la Nasa, une de l’agence spatiale européenne, l’ESA, et une japonaise. Elles se décomposent en trois atterrisseurs et deux orbiteurs. Ces tempêtes de poussières sont-elles un problème pour ces sondes ? C’est ce que vous allez découvrir à présent dans la suite de cet article, « Autant en emporte les tempêtes martiennes » (lien ci-dessous).

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