article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
24 DECEMBRE 2002
Il y a un an presque jour pour jour, les contrôleurs au sol ont désactivé la sonde spatiale Deep Space 1 (DS1). À présent le vaisseau est en sommeil. Mais peut-être qu’un jour, il contribuera à nouveau à faire avancer la science. Par exemple l’archéologie du prochain millénaire…
Imaginez. Nous sommes le 24 décembre 3002. Le pilote d’un vaisseau spatial se concentre sur la tâche qu’il est en train d’accomplir. Soudain il lâche :
- « Ça y est professeur, le rayon tracteur est verrouillé dessus ! C’est… C’est une petite sonde spatiale. Et elle ne date pas d’hier d’après ce que je vois ! »
- « Si je suis dans le vrai, elle ne doit pas être loin du millier d’années » répond l’archéologue. « Peut-elle tenir dans la soute ? Si oui, ramenez-là à bord, j’aimerais y jeter un œil. »
Une lueur apparaît alors et le vaisseau antique se matérialise, suspendu dans les airs. Il s’agit d’un cylindre compact, à peu près de la taille d’un homme, et doté de sortes d’ailes, mesurant 10 mètres d’un bord à l’autre.
- « Panneaux solaires primitifs », confirme le professeur en opinant du chef.
Les parois du vaisseau sont noircies par une longue exposition aux radiations cosmiques. On relève également une grosse trace d’impact, comme si la sonde s’était égarée trop près d’une comète active, et plein de minuscules éraflures, probablement le fruit d’un millier d’années d’exposition aux micrométéorites.
Le doute n’est plus permis : il s’agit d’un authentique vestige des premiers ages de la conquête spatiale !
C’est alors que le professeur remarque une bosse dans le revêtement isolant, un bouton, qui commande l’ouverture d’une petite trappe. Il y a quelque choseà l’intérieur. Le professeur glisse la main par l’ouverture, et en ressort… un disque compact ! Dessus, quelques caractères ont été griffonnés à la hâte. Ils forment le nom Deep Space 1
« C’est du moins ainsi que je m’imagine la façon dont les choses pourraient se passer », sourit Marc Rayman, chef de projet de la sonde de la NASA Deep Space 1 (DS1). C’est lui-même qui glissa le disque compact dans les flancs de la sonde juste avant son lancement en 1998.
Selon lui, « Ce CD est une « capsule temporelle », un message à destination des générations futures. Il contient des informations à propos de la sonde et de sa mission, des messages personnels des membres de notre équipe, et plus de 800 dessins d’enfants auxquels nous avons demandé d’imaginer l’an 3000. »
Dans mille ans, c’est peut-être vers les étoiles lointaines que les élèves des écoles primaires enverront des sondes, au titre de leurs activités d’éveil scientifique. À une époque aussi avancée, « nul doute que les archéologues seront très intéressés de savoir comment nous avons pu résoudre un certain nombre de problèmes techniques avec les connaissances rudimentaires du vingtième siècle. »
Résoudre des problèmes, c’était là tout l’enjeu de la mission Deep Space 1.
Développée dans le cadre du programme « Nouveau Millénaire » de la NASA, Deep Space 1 devait servir de banc d’essai à une douzaine de technologies d’avant-garde, parmi lesquelles on peut citer : un moteur ionique expérimental, des panneaux solaires concentrant la lumière du Soleil pour en tirer plus d’énergie, et un pilote automatique doué d’intelligence artificielle.
« Il y avait de bonnes chances pour que la mission soit un fiasco, tant elle rassemblait d’innovations jamais testées en grandeur réelle » rappelle Rayman.
Pourtant, les 12 innovations ont tenu le coup. En fait, elles ont si bien marché que la NASA n’a pas tardé à prolonger la mission, avec un objectif dont Rayman et ses collègues rêvaient depuis le départ : rendre visite à une comète. Objectif atteint ? C’est ce que vous allez découvrir tout de suite dans la deuxième partie de cet article, « Rendez-vous dans l’espace » (lien ci-dessous)