article de Didier Jamet
22 FEVRIER 2002
Depuis une trentaine d’années, les scientifiques ont observé des perturbations notables de la température de surface des Océans, comme par exemple le fameux phénomène " El Nino " (Petit-Jésus en Espagnol). Ces phénomènes et leurs conséquences sont d’ampleur très variable, sans que l’on sache vraiment dans quelle mesure leurs changements d’intensité et de fréquence peuvent être imputés aux changements climatiques, ou à la variabilité propre du système. Le satellite Terra va permettre d’y voir plus clair.
Un nouveau capteur, Modis, embarqué à bord du satellite Terra effectue tous les jours les relévés les plus détaillés jamais établis de la température de surface des océans. Sorte de thermomètre spatial de luxe, le radio spectromètre Modis aide les scientifiques à étudier la façon dont l’atmosphère et les océans interagissent pour esquisser les couleurs du temps. Ce travail de fourmi est un prélude indispensable à l’éventuelle compréhension des changements climatiques en cours.
En comparant les données collectées par Modis avec celles recueillies plus classiquement par bateaux et bouées, les responsables du projet ont constaté que sa précision était d’un quart de degré Celsius, ce qui est deux fois mieux que les meilleures performances des précédents satellites.
Selon Otis Brown, Doyen de l’école Rosenstiel de science marine et atmosphérique, le besoin de mesures précises de la température des océans est motivé par le souhait des météorologues de réaliser des modèles plus performants du climat.
" Quand vous cherchez dans vos données la signature caractéristique de processus subtils, vous avez vraiment besoin de connaître la température de surface des Océans à deux dixièmes de degré près. C’est la seule façon de suivre sur de grandes échelles de temps des mécanismes infimes, à peine décelable à l’échelle de l’année, mais qui amènent l’ensemble à un nouvel état d’équilibre sur une décennie " Insiste Brown.
Modis sera particulièrement adapté pour prévoir et suivre des phénomènes de Type " El Nino", qui mettent en jeu des variations de température en surface de 2 à 3 degrés Celsius.
L'eau liquide, oui; l'eau vaporeuse, non...
Autre propriété capitale de Modis dans ce contexte, c’est sa capacité à garder sa précision de mesure même au dessus de zones océanique tropicales, où l’atmosphère est généralement saturée de vapeur d’eau. Et c’est justement dans ces régions équatoriales de l’Océan Pacifique que se situent les phénomènes les plus déterminants pour le climat.
Comme tous les radiomètres spatiaux, Modis mesure l’énergie thermique infrarouge émise par la surface des océans. Mais sa particularité est de travailler sur plusieurs longueurs d’onde à la fois, ce qui lui permet de croiser ses données et d’en soustraire les phénomènes parasites engendrés par la vapeur d’eau atmosphérique, et autres gaz à effet de serre.
Avec un tel chaperon, aucun des faits et gestes du " Petit-Jésus " n’échappera plus à la vigilance des scientifiques. Notre compréhension du climat et l’éventuelle maîtrise de ses changements catastrophiques en dépendent.
