article de Didier Jamet
30 JANVIER 2002
Il paraît que les Gaulois n’avaient peur que d’une chose : que le ciel leur tombe sur la tête. Heureux hasard du calendrier, la sortie en salles du deuxième épisode des aventures d’Astérix coïncide avec la rentrée incontrôlée d’un satellite de la NASA. Si la probabilité de dégâts au sol reste faible (et nulle pour le territoire français métropolitain), l’événement relance le débat sur la gestion des installations spatiales en fin de vie.
Euve, satellite dédié à l’observation dans l’ultraviolet, aura cessé d’exister au plus tard jeudi en début d’après-midi heure française. L’instant précis est impossible à déterminer, puisque la rentrée va s’effectuer de manière incontrôlée. La NASA indique un créneau horaire très large, entre quatre heures du matin et une heure de l’après-midi.
Contrairement à ce qui s’était passé pour la station MIR en mars 2001, ou pour le satellite Compton en juin 2000, EUVE n’est pas équipé de propulseurs qui auraient pu permettre de contrôler la descente. C’est donc une chute libre et sans filet que va devoir gérer la NASA. Les mesures permanentes d’altitude effectuées par différents moyens radar, disséminés à la surface du globe, devraient permettre d’affiner ces prévisions peu de temps avant la chute finale.
L’orbite du satellite en perdition couvre une zone comprise entre plus et moins 28,5 degrés de latitude, et survole donc la Floride, l’Amérique Centrale et du sud jusqu’au nord de l’Argentine, presque toute l’Afrique, l’Inde, l’Indonésie, et le nord de l’Australie. Bref, pas mal de monde.
Néanmoins, les responsables de la NASA se veulent rassurants : « la plupart des débris vont probablement s’abîmer en mer, ou dans des régions inhabitées » a déclaré Ronald Mahmot, chef de projet au centre de contrôle de mission Goddard. Il est vrai que Euve survole également les trois océans, et que ces derniers recouvrent l’essentiel de la superficie survolée. Mais la probabilité de chute d’une partie des éléments sur des zones habitées n’est pas nulle.
Sur la balance, EUVE accuse tout de même plus de trois tonnes. Et si on peut espérer que la plupart de ses composants se consument lors de leur rentrée dans l’atmosphère, certains éléments survivront de façon certaine, ceux constitués de titane et d’acier inoxydable par exemple. La NASA en a identifié neufs, qui pèsent entre 2 et 45 kilos. Cela peut paraître bien peu, mais il ne faut pas oublier que ces projectiles se déplacent en orbite à la vitesse faramineuse de 8 kilomètres par seconde. Leur énergie cinétique est donc considérable.
Euve a été lancé en 1992, époque où la réglementation internationale en matière de débris spatiaux était beaucoup moins exigeante qu’aujourd’hui. Actuellement, même si beaucoup reste à faire, les négociations entre agences des différentes puissances spatiales progressent rapidement. Dans le cas typique d’un satellite tel que Euve, plusieurs scénarios sont à l’étude. Deux sortent du lot, et dépendent de l’orbite de travail du satellite :
- Pour les satellites en orbite basse, prévoir systématiquement un dispositif de décrochage contrôlé de l’orbite, permettant d’accompagner la rentrée en douceur, à l’aide de propulseurs et de systèmes de contrôle d’attitude de l’engin
- Dans le cas des orbites élevées, prévoir une réserve suffisante de carburant afin d’envoyer l’appareil sur une orbite cimetière, sans intérêt scientifique ni commercial, encore plus élevée, sur laquelle il tournera pendant des milliers d’années.
En résumé, si demain le ciel ne tombe sur la tête de personne, et si aucun astéroïde ne décide de venir s’en mêler entre-temps, les terriens devraient être tranquilles pour longtemps !
