Destination : cratère Gusev

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Karen Miller
traduction de Didier Jamet
2 JANVIER 2004

Vue du cratère Gusev depuis l’orbite de la sonde Mars Global Surveyor. La flèche indique le sens d’un possible écoulement d’eau vers le cratère.
Vue du cratère Gusev depuis l’orbite de la sonde Mars Global Surveyor. La flèche indique le sens d’un possible écoulement d’eau vers le cratère.

Nasa

Ce 3 janvier 2004, Spirit, un robot d’exploration de la NASA pesant quelque 200 kg, va se poser dans ce qui est censé être le fond d’un ancien lac aujourd’hui asséché.

« Il est à peu près certain que ce site a un jour contenu une vaste étendue d’eau liquide, au moins pendant une bonne période » confirme Jim Garvin, responsable scientifique de l’exploration martienne à la Nasa.

Le site en question est le cratère Gusev, vaste trou dans la surface martienne dont le diamètre avoisine les 145 km et qui a probablement été formé il y a trois ou quatre milliards d’années par la chute d’un astéroïde légèrement au sud de l’équateur martien.

Les sondes en orbite autour de la planète rouge ont repéré un système de canaux qui donnent dans ce cratère, et l’ont probablement alimenté jadis en eau liquide, ou en eau mêlée de glace. « Difficile de reproduire le paysage tel qu’il est aujourd’hui sans ce scénario aquatique » confirme Garvin.

A l’heure actuelle, tout ce que les chercheurs espèrent y trouver, ce sont des sédiments, lesquels pourraient former une couche de près de 900 mètres d’épaisseur. Ces sédiments auraient été déposés par l’eau puis exposés à l’air libre et finalement recouverts de poussière depuis deux milliards d’années.

Mais s’il y a bien eu de l’eau liquide dans le cratère Gusev un jour, elle aura certainement laissé des traces.

Au-delà de l’eau, c’est naturellement un environnement propice à l’apparition de la vie que l’on recherche sur Mars. Vu depuis l’orbite martienne, cela semble évident. Mais Garvin prévient : on ne pourra être absolument certain qu’il y a bien eu de l’eau dans le cratère Gusev tant que l’on ne s’y sera pas posé.

« L’aspect du cratère Gusev tel que nous le voyons aujourd’hui aurait tout aussi bien pu être dessiné par de la lave en fusion, un glacier, ou même des vents » insiste-t-il. « Et si c’est bien de l’eau qui en est responsable, la présence de cette dernière aurait pu être permanente, ou intermittente, par vagues d’inondation. » La gamme d’instruments que comporte le robot explorateur Spirit devrait aider à préciser ce scénario.

Spirit va d’abord décaper la roche superficielle des échantillons qu’il examinera afin d’avoir accès à des minéraux préservés des rayonnements qui baignent la surface martienne. Il sera également capable de dresser un panorama de son environnement avec un luxe de détail jamais atteint. Il pourra également se déplacer vers les endroits les plus intéressants pour les étudier de plus près.

Armé de ces outils et de beaucoup d’autres, Spirit s’attachera à comprendre ce qui s’est réellement passé dans le cratère Gusev au cours des derniers milliards d’années.

Un signe indiscutable de la présence passée de l’eau devra être cherché dans les roches. Si par exemple le cratère Gusev a jadis été le berceau d’un lac géant, certains minéraux sont susceptibles de se trouver encore dans ses roches. Spirit est donc susceptible de découvrir des évaporites, soit des minéraux formés lorsque l’eau s’évapore. Le sel ou le gypse en sont des exemples familiers sur Terre. Les composants du sel (le sodium et le chlorure) sont séparés car dissous dans l’eau de mer, mais quand une étendue d’eau marine s’assèche, le sodium et le chlorure s’associent pour former le minéral halite.

Sur Mars, Spirit va par exemple pouvoir trouver du gypse, ou des sulfates de calcium et de magnésium. Il pourrait aussi découvrir des minéraux comprenant des carbonates (du carbonate de calcium par exemple). Ces carbonates sont parfois, mais pas systématiquement, produits par des organismes vivants. Mais en revanche ils sont quasiment toujours caractéristiques de la présence d’eau, « du moins ici sur Terre » tempère Garvin.

Un autre signe clair devrait être fournie par la façon dont sont organisés les sédiments. S’ils ont été balayés par les vents, leurs couches seront disposées très irrégulièrement, selon les régimes changeant des vents (comme les dunes fossiles sur Terre).

S’ils ont été déposés par de l’eau, leur disposition sera probablement plus régulière, une couche au-dessus de l’autre à intervalle régulier.

Selon Garvin, le résultat les plus passionnant serait de prouver que de l’eau liquide a bien persisté dans le cratère Gusev pendant une longue période. « Les étendues d’eau persistantes auraient été des habitats parfaits pour l’éclosion de la vie » conclut Garvin.

En réalité, tout ce que nous pourrons apprendre sur le cratère Gusev sera passionnant. Qu’il ait été un jour rempli d’eau ou pas. Qu’il ait pu un jour abriter la vie ou non. Tous ces résultats seront déterminants pour l’avenir de l’exploration martienne.

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