Troisième et dernière partie

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Trudy E. Bell
traduction de Didier Jamet
10 AOUT 2002

Allo la base ?...
Allo la base ?...

Frassanito et Associés

Le générateur au plutonium du four délivrait 100 watts d’électricité continue. Régler la puissance de façon à obtenir une fonte progressive aurait fourni une gadoue informe, impossible à ingurgiter. Aussi il opta pour une procédure méthodique : porter brusquement la température de l’échantillon à 200 degrés centigrades, vaporisant ainsi immédiatement toute la glace. Au travers de la petite fenêtre, il regarda de délicieuses gouttelettes se condenser sur le plateau de refroidissement, et rouler vers la coupelle de recueillement. La bouche pâteuse, il couvait des yeux le spectacle.

Une pensée lui traversa l’esprit. Etait-il prudent de consommer cette eau distillée ? Quels minéraux pouvaient encore s’y trouver dissous ? Et si même elle contenait des organismes martiens ? Au camp il y avait tout ce qu’il fallait pour faire les tests et stériliser – et pourtant même là ils n’utilisaient pas l’eau martienne pour la consommation.

Mais la vue de la coupelle en train de se remplir lui mit une idée irrésistible dans la tête. Je ne vais pas simplement boire une gorgée d’eau pensa-t-il. Je vais être Le Premier à boire de l’eau de Mars.

Il déverrouilla la porte externe du four, en retira la coupelle et esquissa le mouvement de verser le contenu dans la réserve d’eau de son scaphandre – mais pas assez vite. L’eau commença à entrer furieusement en ébullition et se transformer en vapeur, débordant du récipient et se pétrifiant en un minuscule nuage de cristaux de glace. Quelques instants plus tard, la coupelle était parfaitement sèche.

Il s’efforça de garder son calme. L’eau liquide était hautement instable dans l’atmosphère martienne ténue, très proche du vide. Il le savait, mais il n’avait pas imaginé la rapidité avec laquelle elle se vaporiserait.

Pourrait-il rentrer sans eau ? Il jeta un coup d’œil circulaire à l’environnement hostile et eut froid dans le dos. Cela lui apparut comme une évidence qu’il était temps de demander de l’aide par radio, histoire de voir si quelqu’un pouvait se porter à sa rencontre avec pas mal d’eau.

« Oui oui, tu avais raison… » marmonna l’explorateur tandis qu’il bascula le commutateur pour interrompre la transmission. C’était à coup sûr le biologiste qui lui avait répondu.



Fin



Note : les informations sur la nature probable des sols martiens chargés en eau ainsi que la description de la procédure méthodique du four analyseur en phase gazeuse ont été fournies par James Garvin, responsable scientifique de l’exploration martienne au quartier général de la NASA. Elles s’appuient sur les résultats de la sonde Mars Odyssey et ses prédécesseurs. L’explorateur, dont toute ressemblance avec un personnage réel serait bien sûr purement fortuite et involontaire, est la réincarnation au 21eme siècle de l’anonyme mineur au caractère de cochon qui fut le personnage de la fameuse nouvelle de Jack London en 1908, construire un feu. Le robot tout-terrain dédié au transport de fret est quant à lui l’avatar technologique du chien de ce personnage, un Husky.



Quelques liens pour aller plus loin. (en français)

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