article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
15 NOVEMBRE 2006
Dimanche 19 novembre peu avant l'aube, la Terre passera au travers d’une traînée de débris laissés par la comète 55P/Tempel-Tuttle en 1933. À quoi faut-il s’attendre ? À une des meilleures pluies d’étoiles filantes de 2006, mais un petit millésime de Léonides.
" Nous attendons un pic de plus de 100 Léonides par heure " confirme Bill Cooke, le chef du bureau de suivi des météoroïdes de la NASA basé à Huntsville, Alabama. C’est relativement peu comparé aux véritables déluges de Léonides qui eurent lieu en 2001 et 2002, pendant lesquels on put observer des milliers de météores. Cependant, une centaine d’étoiles filantes par heure suffirait à classer nettement les Léonides comme une des meilleures pluies de 2006.
Le seul problème pour être sûr de les voir sera de se trouver au bon endroit au bon moment.
Le croisement de la Terre avec les poussières de comètes durera peu, " peut-être pas plus de quelques heures " prévient Cooke. Les prévisionnistes divergent quant à la question de savoir lorsque le pic se produira. Les estimations vont de 04 h 45 T .U. à 06 h 30 T.U. (rajoutez une heure pour avoir l’heure légale en Europe Continentale). L’évènement serait donc observable au mieux depuis l’Europe Occidentale, l’Afrique, le Brésil et l’est de l’Amérique du Nord.
Cooke recommande de se trouver dans l’endroit le plus sombre possible. " Les Léonides de cette année seront particulièrement faibles ". Pourquoi ? " Le courant traversé cette année contient des grains de poussière de très petite taille. Et qui dit petites poussières dit petites étoiles filantes. C’est aussi simple que ça. "
La portion de l’orbite terrestre dans laquelle se trouve notre planète à la mi-novembre est jonchée de débris de la comète Tempel-Tuttle. Chaque fois que la comète revient dans les parages du Soleil, tous les 33 ans, elle laisse dans son sillage un nouveau courant de poussières, de grains et de roches. Cela finit par former une sorte de " champ de mines " au milieu duquel la Terre s’aventure chaque mois de novembre.
Pas un de ces courants de débris cométaires ne ressemble exactement à un autre. Par exemple, " le courant de Léonides dans lequel nous avons tapé en 1998 était plein de débris de la taille de petites pierres. Elles ont formé de brillantes boules de feu lorsqu’elle sont rentrées dans l’atmosphère. Le courant de cette année est exactement l’inverse. Il est essentiellement constitué de fines poussières. "
Mais au fait, pourquoi y a-t-il des courants faits de fines poussières et d’autres constitués de graviers ? C’est la force du rayonnement solaire qui en est responsable. Prenons le courant vers lequel nous nous dirigeons actuellement. " Il a été éjecté en 1933 " précise Cooke. " Au début, il était constitué de débris de toutes tailles ". Mais au fil des ans, les petites particules ont été séparées des plus grosses. C’est la pression de radiation, la très légère poussée provoquée par l’impact des photons solaires, qui a décalé les plus petites poussières vers une trajectoire de collision avec la Terre. La pression de radiation a moins de prise sur les gros fragments, plus lourds, ce qui fait qu’ils sont restés à peu près en place.
Dans le futur, il n’est pas exclu que nous croisions la route ces gros débris de 1933, ce qui serait l’occasion d’une pluie de bolides quelque peu tardive. Comment pourraient-ils se retrouver ainsi sur une trajectoire de collision avec la Terre ? " En recevant un petit coup de pouce de Jupiter " suggère Cooke. Il se trouve que le champ de gravité de Jupiter est suffisamment puissant pour altérer la course des fragments les plus lourds au niveau de l’orbite terrestre. En amenant les débris dans notre direction, Jupiter a déjà été indirectement responsable de quelques mémorables pluies d’étoiles filantes.
Mais nous sommes aujourd’hui en 2006. Alors ne vous attendez pas à des Léonides exceptionnelles...
Note : Ne vous fiez pas aveuglément à tout ce qui est écrit ci-dessus. Si les prévisionnistes de météores (par exemple David Asher ou Jérémie Vaubaillon) ont généralement fait un excellent travail ces dernières années, parvenant même à donner l’heure du pic d’activité à quelques minutes près, ils pourraient malgré tout s’être trompés pour 2006. Il reste une possibilité pour que le pic se produise à un moment inattendu, ou bien être finalement meilleur que prévu. Bill Cooke vous encourage donc malgré tout à regarder ce qui se passe dans le ciel les nuits du 17 au 18 et du 18 au 19 novembre. " Le meilleur moment pour observer " insiste-t-il, " c’est peu avant l’aube, lorsque la constellation du Lion est bien haute dans le ciel ".