Année lumière

Planche extraite de la thèse de Léon Foucault, \
Planche extraite de la thèse de Léon Foucault, "Mesure de la vitesse de la lumière", 1862

Gallica
Conversion année-lumière / unité astronomique / parsec / kilomètre

L'année-lumière est une unité de distance qui représente la distance parcourue par la lumière dans le vide pendant une année terrestre. La vitesse de la lumière étant de 299.792 km/s, la lumière parcourt donc 9.460 milliards de kilomètres en un an, soit la vitesse de la lumière multipliée par 31.557.600 secondes dans une année moyenne (60 secondes pour faire une minute multipliées par 60 pour faire une heure, x 24 pour faire un jour, x 365,25 pour faire un an).

Mesurer les distances astronomiques

L'année-lumière est une unité de mesure largement utilisée en astronomie pour évaluer les distances dans l'univers en s'affranchissant du kilomètre qui est une unité bien trop petite pour décrire des distances... astronomiques ! Sauf bien sûr à accepter d'écrire et lire des distances avec une armée de zéro derrière les chiffres significatifs, voire en écrivant des distances en milliards de milliards de kilomètres, ce qui n'évoque finalement pas grand-chose.

Que l'on se représente la distance de l'étoile la plus proche du système solaire, Proxima Centauri en kilomètres, soit 40.019 milliards de kilomètres, plutôt qu'en 4,3 années-lumière, passe encore.

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Mais qu'en est-il de la taille de notre galaxie, 130.000 années-lumière soit 1,2 milliards de milliards de kilomètres ? Et autant oublier d'emblée les kilomètres pour mesurer la distance de la galaxie d'Andromède, M31, la galaxie spirale la plus proche de la nôtre, située à 2,2 millions d'années-lumière (soit tout de même 20,8 milliards de milliards de kilomètres, en arrondissant, ne chipotons pas).

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L'astronomie a besoin donc d'unités de distance adaptées à la dimension de l'univers. De même que l'Unité Astronomique (1 année-lumière = 63.000 unités astronomiques) est utilisée dans le système solaire, ou aussi le parsec (1 AL = 0,307 parsecs) pour des calculs de distance dans l'univers, l'année-lumière s'est imposée en particulier vers le grand public pour décrire possible les distances, le plus simplement, en adoptant surtout un référentiel qui évoque quelque chose de concret pour nous tous.

On évoque aussi parfois la "seconde-lumière" pour désigner la distance parcourue par la lumière en une seconde, soit un peu moins que la distance Terre-Lune, ou encore la "minute-lumière" dont la plus célèbre utilisation est la distance entre la Terre et le Soleil, distants de 8,2 minutes-lumière. Toutefois, pour ces distances plus modestes à l'échelle de l'astronomie, l'utilisation des kilomètres (130.000 km de distance de la Lune, 150 millions pour le Soleil) reste une distance intuitive.

L'homme, mesure de toute chose

L'acceptation d'une unité de mesure repose en effet sur sa force évocatrice. Ou, pour parler comme Protagoras, « l'homme est la mesure de toute chose ».

Avant l'invention du système métrique, si l'on s'en tient à la mesure des distances, la lieue était communément utilisée en ayant pour référence la distance qu'un humain parcourt à pieds en une heure, soit environ 4 km. « Environ » puisque, ne serait-ce qu'en France, chaque région avait sa propre lieue.

Une telle approximation abolissait toute utilisation scientifique pérenne de la lieue en tant qu'unité de distance et nécessitait l'invention d'unités telles que celles du système métrique révolutionnaire. Néanmoins, chacun se représentait la distance de la lieue par rapport au temps : « je marche pendant une heure, ça me fait une lieue » (mais je peux avoir de grandes jambes, être plus ou moins pressé...).

Même si le kilomètre apparaît abstrait au premier abord, chacun se représente ce qu'est un kilomètre en distance parcourue à pieds (environ un quart d'heure pour garder l'analogie avec la lieue de l'Ancien Régime), ou en voiture. Quoique la perception soit là encore sujette à variations puisque le kilomètre parcouru sera bien différent sur un périphérique urbain aux heures de pointe ou sur une route départementale toute droite dans les Landes limitée à 80 km/h.

En astronomie, la distance mesurée en années-lumière est donc conceptuellement de même nature que la lieue : même si aucun homme n'a jamais voyagé à la vitesse de la lumière, il peut se forger une représentation mentale de ce que représente un voyage d'une année à ladite vitesse.

Première estimation de la vitesse de la lumière grâce aux satellites de Jupiter

Avant que l'année-lumière ne devienne à la fin du XIXème siècle cette unité de mesure du cosmos, encore fallait-il connaître la vitesse de déplacement de la lumière.

Jusqu'au XVIIème siècle, la croyance commune est que la lumière se transmet instantanément.

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Les quatre satellites galiléens de Jupiter, découverts en janvier 1610 par Galilée, ont été d'une importance capitale dans l'histoire de l'astronomie

C'est l'astronome danois Römer, qui travailla a l'observatoire de Paris, qui conjectura que la lumière se déplaçait à une vitesse limitée et non instantanée et donna, en 1676, la première estimation de la vitesse de la lumière. Pour cela il s'appuya sur l'observation des éclipses de Io, le plus proche des quatre satellites de Jupiter découverts au début de son siècle par Galilée.

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Io accomplit son orbite autour de Jupiter en 1,77 jour terrestre et, du fait de la taille de la géante gazeuse, de sa proximité et du plan de son orbite très proche du plan de l'orbite de Jupiter elle-même, la petite lune galiléenne est éclipsée à chaque révolution.

Römer observa que les éclipses de Io se produisaient soit en avance, soit en retard par rapport aux mouvements moyens connus. L'avance était maximale quand Jupiter et la Terre étaient en conjonction, et maximale lorsqu'ils étaient en opposition.

Io accomplit sa révolution autour de Jupiter en 42h 28m 30,7s. Soit 206 éclipses dans le courant d'une année terrestre.

Si on observe une première éclipse de Io lors de la conjonction, puis une seconde 6 mois plus tard (soit 103 éclipses de Io plus tard), cette seconde éclipse devrait se produire 42,4751 x 103 heures plus tard, soit 182 jours 6h 56m 42s après la première. Or la méthode suivie par Römer permet de constater que la 103ème éclipse se produit avec un retard d'un peu plus de 16 minutes (en fait les premières observations de Römer s'établirent à 22 minutes, mais la mesure fut par la suite affinée, à la fin du XVIIIème siècle).

Ces observations n'étaient explicables que si la lumière se déplace à une vitesse donnée, et non instantanément comme on le croyait précédemment. Le retard décalage entre l'heure théorique de l'éclipse et son observation depuis la Terre à 6 mois d'intervalle entre l'opposition et la conjonction avec Jupiter correspond donc au temps que met la lumière à parcourir le diamètre de l'orbite terrestre (en négligeant l'excentricité des orbites), deux fois la distance entre la Terre et le Soleil.

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Configuration des positions de la Terre à la conjonction (T) et à l'opposition (T') et de Jupiter (resp. J et J') par rapport au Soleil

Crédit : Eléments de cosmographie, 1886

Le retard de l'éclipse de Io correspond à ~16,5 minutes, et le Soleil se trouve bien à 8,3 minutes-lumière de la Terre.

Pour en déduire la vitesse de la lumière telle que nous la connaissons, il fallait bien entendu aussi connaître précisément la distance entre la Terre et le Soleil. En 1676, lorsque Römer fit ses premières prévisions du décalage des éclipses, cette distance n'était pas connue de manière suffisamment précise mais la vitesse de la lumière était désormais une notion établie pour la physique et l'astronomie.

Les estimations plus précises du XIXème siècle

La mesure plus précise de la vitesse de propagation de la lumière a été réalisée par des expériences de physique qui ont succédé à l'approche fournie par l'astronomie de l'observation des satellites de Jupiter héritée de Römer, complétée par la suite avec l'observation du phénomène de l'aberration des étoiles.

Fizeau a réalisé en 1849 une expérience basée sur un faisceau lumineux passant par une roue dentée et réfléchi par un miroir distant de plus de 8.633 mètres (distance entre le Mont Valérien à Suresnes et Montmartre) qui réfléchissait le rayon lumineux dans la même direction. Lorsque la roue crénelée était en repos, le faisceau lumineux retraversait la même fente et le miroir recevant la lumière en retour était éclairé. Si la roue tournait assez vite pour que le rayon réfléchi tombe sur le créneau suivant, le miroir récepteur était obscur. Et si la roue tournait encore plus vite pour que le faisceau tombe sur la fente suivante de la roue, alors le miroir était à nouveau éclairé.

Planche extraite de \
Planche extraite de "Détermination de la vitesse de la Lumière" de A.Cornu, 1875

Crédit : Jubilothèque, la Bibliothèque numérique patrimoniale de l'UPMC

L'expérience de Fizeau a été renouvelée et améliorée en 1874 par A.Cornu entre l'Observatoire de Paris et la Tour de Montlhéry, conduisant à une valeur de 298.400 km/s.

Et en 1862, Léon Foucault développait une expérience basée sur des miroirs en rotation, une idée méthode déjà émise par Arago, qui lui permet de mesurer non seulement la vitesse de la lumière, 298.500 km/s selon lui, et il montra aussi la vitesse de propagation de la lumière plus faible dans l'eau que dans l'air.

Pour finir avec le XIXème siècle, Newcomb reprit la méthode de Foucault et établit une vitesse de 299.860 km/s, soit une valeur très proche de celle que nous connaissons aujourd'hui.

Dans notre dictionnaire de l'astronomie...

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