article de Didier Jamet
18 MAI 2002
Les astrophysiciens soupçonnaient depuis longtemps l’existence d’un lien entre supernovae et sursauts gamma, ces formidables bouffées de rayonnement dont la puissance n’a d’égale que la fréquence (un par jour en moyenne). Plusieurs équipes internationales, concentrant leurs moyens d’observation sur un sursaut repéré en novembre 2001, viennent d’en obtenir des indices très convaincants.
C’est au satellite Beppo-Sax que revient le mérite de la détection initiale du sursaut gamma
GRB 011121 à l’automne dernier, dans la constellation du Caméléon, à proximité du pôle Sud céleste. Aussitôt, tous les satellites pouvant aider à la localisation précise de l’événement furent mobilisés. Les chercheurs réalisèrent alors qu’il s’était produit dans une galaxie relativement proche : 6 milliards d’années-lumière (ce qui signifie tout de même que le sursaut dont la lumière nous atteint aujourd’hui s’est produit à une époque où la Terre et le Soleil n’étaient pas encore formés…).
Une chance unique
Cette proximité relative fut donc interprétée comme une chance unique de vérifier l’hypothèse du lien supposé entre supernovae et sursauts gamma. Si une supernova était bien à l’origine du phénomène, il devait y avoir une chance pour que l’impact de son onde de choc sur le milieu interstellaire ambiant finisse par surpasser en intensité la lumière du sursaut, entraînant un regain d’éclat significatif visible depuis la Terre. Et c’est exactement ce qui s’est passé, les données recueillies s’avérant très proche de la courbe de lumière d’une supernova de type Ic.
Gros moyens
Pour en arriver là, il aura fallu mobiliser rien moins que le télescope Polonais de 1,3 mètre installé au Chili (il a obtenu la première image de la « lueur tardive » du sursaut, les braises de l’incendie en quelque sorte), le Magellan de 6,5 mètres (pour la spectroscopie), et le télescope spatial Hubble lui-même. Seul un tel emploi simultané de moyens pouvait permettre de transformer une intuition en un faisceau convergent de preuves. C’est par exemple la première fois que l’on a pu obtenir le spectre lumineux d’une supernova suspectée d’association avec un sursaut gamma.
Reste que les sursauts gamma sont encore loin d’avoir livré tous leurs secrets. Certains d’entre eux, pourtant étudiés avec la même minutie que GRB 011121, n’ont pas révélé les mêmes caractéristiques. D’autres évènements, très exotiques, pourraient donc les avoir engendrés, par exemple des collisions d’étoiles à neutrons, ou bien encore des fusions de trous noirs.
Une autre explication tient au fait que les explosions de supernovae pourraient se produire non pas de façon uniforme et omnidirectionnelle, mais au contraire de façon asymétrique et directionnelle, à la manière du pinceau lumineux d’un phare. Le fait que certains sursauts gamma ne puissent pas être directement reliés à des supernovae serait donc un biais observationnel, la Terre ne se trouvant tout simplement pas balayée par ce pinceau lumineux.
