Une colonie martienne grâce à l’antimatière ?

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Linda Voss
traduction de Didier Jamet
3 SEPTEMBRE 2002

Un « piège à antimatière » développé à l’Université d’état de Pennsylvanie emmagasine les antiprotons.
Un « piège à antimatière » développé à l’Université d’état de Pennsylvanie emmagasine les antiprotons.

PSU

Ça ressemble à de la science fiction, mais les chercheurs apprennent à créer et emmagasiner de petites quantités d’antimatière dans leurs laboratoires terrestres bien réels. Par exemple un piège portable électromagnétique à antimatière en service à l’Université d’état de Penn, peut conserver 10 milliards d’antiprotons pendant une semaine. Si on parvenait à savoir comment l’utiliser en toute sécurité, on pourrait diriger de l’antimatière sur un fin jet d’hydrogène pour créer la poussée. Une autre façon d’utiliser l’antimatière serait de l’injecter dans un réacteur à fusion afin d’abaisser la température critique de fusion.

« La propulsion n’est pas la seule raison d’aller vers le nucléaire (ou l’antimatière), » fait remarquer Colleen Hartman, qui dirige le programme d’exploration du système solaire. « les appareils de bord en profitent également. Le surcroît de puissance revient à remplacer une simple ampoule électrique par l’artère principale de Las Végas. Ça vous offre de meilleures possibilités de communication et une plus grande souplesse dans l’exécution de la mission. »

L’atterrisseur du laboratoire mobile Mars Smart Lander, dont le lancement est prévu en 2009, passera du solaire au nucléaire. « Installer l’énergie nucléaire à bord donnera à la mission une espérance de vie de 5 ans, contre 3 à 6 mois avec l’énergie solaire. » affirme Ed Weiler, chef de Space Science Enterprise. « Cela permettra au robot tout-terrain de se diriger vers un endroit précis plutôt que d’y atterrir directement. La bande passante pour l’échange de données en profite également. Le robot explorateur pourra travailler 24 heures sur 24. Tout s’améliore d’un facteur 10 quand vous ajoutez un RTG à une mission. »

Si on veut rééditer l’expérience Mars Lander à l’échelle d’une mission habitée sur Mars, cela nécessite plus de puissance. Il faut prendre en compte le chauffage de l’habitat, le refroidissement des ordinateurs, l’éclairage, la production d’oxygène, l’électrolyse pour recycler l’eau, à quoi il faut encore ajouter la recharge des batteries des tout-terrains d’exploration, ce qui porte la consommation à 30 kilowatts selon Jeff George.

Pour une mission de longue durée, « nous ne disposons pas du type d’énergie qui permet de rentrer précipitamment à la maison (en cas d’urgence) » ajoute Gary Martin, administrateur associé assistant pour les systèmes avancés au bureau des vols spatiaux. « Il faut construire des engins qui soient ultra-fiables, auto réparateurs, et capables de prendre une décision tout seul quand ils sont en mauvaise posture. »

Les pièces endommagées devront être réparées ou reconstruites sur place, il n’y aura pas de place pour les pièces de rechange. Selon George, des processus très consommateurs de puissance comme fabriquer des pièces ou produire du carburant pour quitter Mars nécessiteraient encore 60 kilowatts de plus.

Au final, aucune source d’énergie ne pourra suffire à elle seule à couvrir tous les besoins.

Considérant la question dans son ensemble, John Mankins récapitule : « Il nous faut une propulsion électrique extrêmement efficace et de grande puissance pour le voyage interplanétaire, des systèmes de propulsion chimique de haute énergie pour aller et venir à la surface des planètes, et enfin nous avons besoin d’être capable d’emmagasiner de l’énergie solaire ou chimique de façon à vivre et travailler à la surface. Les robots pourraient utiliser l’énergie radio isotopique, l’énergie nucléaire et la transmission d’énergie à distance par ondes dirigées sont également considérées. »

Les choix sont nombreux, mais une chose est sûre : où que nous allions dans l’espace, et quoi que nous y fassions, nous aurons besoin de plus de puissance.



Quelques liens pour aller plus loin (en anglais)

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