La Vie joue-t-elle à cache-cache avec les nuages interstellaires ?

article original publié par Science @ Nasa
auteur : Docteur Tony Phillips
traduction de Didier Jamet
8 JANVIER 2003

Le télescope spatial CHIPS

« Il y a beaucoup de questions auxquelles nous ne savons toujours pas répondre » confesse Hurwitz, qui est le responsable scientifique de la mission : quel est l’age de cette bulle ? Est-elle parfaitement homogène ? À quelle vitesse se refroidit-elle ? CHIPS devrait apporter de précieux éléments de réponse.

En orbite autour de notre planète, CHIPS scrutera la bulle à l’aide d’un télescope sensible à l’ultraviolet.

« Le gaz à l’intérieur de la bulle est très brillant aux longueurs d’onde ultraviolettes lointaines, aux alentours de 170 angströms » explique Hurwitz. D’autres satellites s’y sont déjà essayés, mais CHIPS a un atout maître : son spectromètre fonctionne sur 150 canaux allant de 90 à 260 angströms.

Tout comme les sédiments dans l’Océan Pacifique, le gaz de la bulle locale contient une variété de fer produit dans les supernovae. « Les atomes de fer situés dans la bulle ont perdu bon nombre de leurs électrons, arrachés à l’occasion de collisions avec le gaz chaud. Le spectromètre de CHIPS sera capable de détecter les lignes spectrales particulières produites par des atomes de fer auxquels il manquera 8, 9, 10 ou 11 électrons. En comparant l’intensité de ces quatre lignes spectrales, CHIPS sera en mesure de cartographier la densité et la température précise du gaz à l’intérieur de la bulle.

« Si nous détectons un point chaud » indique Hurwitz, « il s’agira peut-être de la position de la plus récente supernova. » Le spectre renseignera également les chercheurs sur la rapidité avec laquelle le gaz se refroidit et, partant, leur permettra de déterminer l’age des différentes parties de la bulle. Par exemple on peut considérer qu’une concentration de gaz se refroidissant rapidement mais se trouvant encore à une température relativement élevée doit être assez jeune.

Explorer la géographie de la Bulle est primordial car ce qui se trouve à l’intérieur pourrait affecter le futur de notre planète.

Durant les quelques derniers millions d’années, de ténus filaments de gaz interstellaire ont dérivé dans le vide. Notre système solaire est immergé dans un de ces filaments, appelé le « nuage local ». il s’agit d’un nuage relativement froid (7000 degrés) contenant 0,1 atome par centimètre cube. Rapporté à la moyenne galactique, le duvet local n’a rien de très substantiel. Il n’affecte que très peu la Terre car le champ magnétique et le vent solaire sont suffisamment intenses pour le tenir à distance.

Il existe cependant des nuages plus denses. Le complexe Sco-Cen par exemple, envoie dans notre direction un chapelet de « petits nuages » interstellaires. « On estime que certains de ces nuages peuvent être quelques centaines de fois plus denses que le nuage local » nous dit Priscilla Frisch, astrophysicienne de l’Université de Chicago, qui étudie le milieu interstellaire. « Si nous croisions la route d’un de ces nuages, le champ magnétique solaire pourrait bien se trouver comprimé au point d’autoriser l’arrivée de rayons cosmiques plus nombreux dans le système solaire intérieur, avec des répercussions difficiles à évaluer sur les climats et la vie même à la surface de notre planète. »

CHIPS sera capable de détecter de denses nuages interstellaires par l’ombre qu’ils projettent. Les nuages froids sont partiellement opaques au rayonnement UV de la bulle, aussi ils apparaîtront sous la forme de zones plus sombres sur les cartes dressées par CHIPS.

Hurwitz fait cependant remarquer que les premières cartes du ciel de la mission seront assez grossières, avec une résolution pas meilleure que 5 degrés par 25. (à titre de comparaison, la « casserole » de la Grande Ourse mesure environ 10 degrés). Aussi seuls les plus grands nuages y apparaîtront. Plus tard toutefois, si la mission est prolongée au-delà de l’année initialement prévue, CHIPS produira des cartes avec une meilleure résolution, de l’ordre de 5 degrés par 6.

Frisch a remarqué que l’Homo Sapiens semble être apparu seulement après que le milieu interstellaire local fut dégagé. Elle suggère que la raréfaction des nuages interstellaires aurait assuré un climat plus stable à notre planète. L’étoile qu’Australopithèque a vue en plein jour était peut-être un bon présage après tout…

CHIPS nous aidera à le déterminer.



Quelques liens pour aller plus loin

La mission CHIPS expliquée au grand public

Le Fer et ses isotopes

Le milieu interstellaire

La Bulle locale (en français)

Son voisinage galactique

Sco-Cen

L’Ozone et les étoiles

Traces de supernovae sur Terre ?

La prochaine supernova

La vie à l’abri des supernovae ?

Rencontre rapprochée avec la matière interstellaire

Le nuage interstellaire local (en français)

Attaque aux gaz

L’environnement galactique du Soleil

Dans notre dictionnaire de l'astronomie...

Le ciel au dessus de Genève avec des nuages, la Lune, Vénus, et un coucher de Soleil.
à lire aussi...
Ciel
L'astronomie débute par l'observation du ciel, qu'elle ne définit pas rigoureusement. Le ciel commence au-dessus de notre tête, regroupant oiseaux et étoiles.
carte du ciel
à lire aussi...
La carte du Ciel
Découvrez l'astronomie avec notre carte du ciel interactive, avec l'aspect des constellations, de la Lune et des planètes depuis tous lieux et toutes dates
"La nuit étoilée à Saint-Remy", de Van Gogh.<br>Pour voir l'Univers tel qu'il est, il faut soit la rigueur du scientifique, soit la sensibilité de l'artiste.Tout le reste n'est qu'illusion...
à lire aussi...
Etoile
Voici la représentation classique d’un atome d’hélium. Son noyau est constitué de deux neutrons et de deux protons. Il est entouré de deux électrons situés dans le nuage électronique.
à lire aussi...
Atome
Voici la représentation classique d’un atome d’hélium. Son noyau est constitué de deux neutrons et de deux protons. Il est entouré de deux électrons situés dans le nuage électronique.
à lire aussi...
Electron
cosmos | collision | champ magnétique du soleil | champ magnétique | carte | astrophysicien | astrophysicien | cosmos | collision | champ magnétique du soleil | champ magnétique | carte