article de Didier Jamet
28 MARS 2002
Le satellite d’observation océanique SeaWIFS vient de révéler l’étendue d’un étrange phénomène qui a sévi tout l’hiver au nord des célèbres Keys de Floride : une gigantesque marée noire organique, dont l’origine précise reste indéterminée.
Au maximum de son étendue, courant février, le phénomène couvrait une superficie de plus de 1000 kilomètres carrés. Les pécheurs locaux furent les premiers à donner l’alerte, inquiets de ne plus trouver aucun des poissons qu’ils avaient l’habitude de capturer sur la zone.
Des prélèvements ont donc été effectués par différents laboratoires d’écologie marine. Aujourd’hui, les résultats préliminaires laissent à penser que le phénomène pourrait être associé à une prolifération d’algues microscopiques, vraisemblablement des diatomées, algues unicellulaires entourées d’une coque siliceuse bivalve. Mais aucune certitude n’est encore acquise.
Autre résultat de ces prélèvements, la concentration en oxygène de l’eau est restée tout le temps compatible avec la survie des poissons. S’ils ne sont plus là, on peut du moins espérer qu’ils ne sont pas morts, et ont simplement migré vers des eaux moins troubles, plus en rapport avec leurs capacités sensorielles.
Reste que les scientifiques se demandent toujours quel facteur favorisant a bien pu engendrer une telle éclosion d’algues, d’une ampleur inédite dans la région.
En France, dans les estuaires Bretons, on assiste fréquemment l’été à des phénomènes d’eutrophisation, des indigestions de substances nutritives s’accompagnant de conséquences similaires en termes de proliférations d’algues. La pratique de l’agriculture intensive, et les rejets de composés azotés dans les cours d’eau qu’elle entraîne, est généralement tenue pour responsable du phénomène.
Pourtant, la configuration est assez différente en Floride. L’hypothèse des eaux de ruissellement riches en nutriments a bien été envisagée, mais les analyses n’ont rien révélé de tel. Les recherches continuent, mais pour le moment la " marée du Diable " garde tous ses mystères.
Après avoir révélé son ampleur, les observations futures de SeaWIFS suivant à la trace le phénomène permettront de préciser sa dynamique, et aideront à l’expliquer.
